Clairement, au vu du très bon article de Lasagne Générationnelle, je suis à cheval entre la 1ère et la 2ème générations. Et ma fille est dans la 5ème : pour elle, ça a toujours existé!

Le documentaire de BiTS est amusant mais n'apprend pas grand chose à qui s'intéresse à l'animation japonaise depuis ses débuts. Ça fait plus "séquence nostalgie" pour les vieux qui, comme moi, regardaient Saint Seiya dans le Club Dorothée, ont acheté les premiers Gunnm et Dragon Ball édités par Glénat, et ont effectivement découvert Akira dans leseul cinéma parisien qui le passait.  "Aaaaah, les jeunes, c'était le bon temps quand on claquait 200 balles dans une sombre boutique pour une VHS mal doublée des OAV 5 à 8 de Kimagure Orange Road.". (C'est drôle, j'ai du mal à convaincre la jeune génération que "c'était mieux avant"!)

On oublie aussi qu'à l'époque du Club Do, une autre chaîne diffusait nombre de DA japonais qui pour le coup, eux, étaient tout à fait adaptés aux enfants : la Cinq. Nombre de ces séries ont très bien marché en leur temps sans qu'on puisse leur reprocher d'être trop violents ou sexuels (même si la censure passait certainement par là aussi) : Princesse Sarah, Jeanne et Serge, Olive et Tom, Creamy, etc. Et je ne citerai pas les myriades d'autres séries gentillettes du style "Dans les Alpes avec Anette" ou "Gwendolyne". On aime ou on n'aime pas mais c'était quand même bien la preuve que si on s'intéressait à la production japonaise, on pouvait trouver des séries animées vraiment faites pour les enfants.

En fait, la grande incompréhension est venue du fait qu'en France, la notion de dessin animé pour ado ou jeune adulte n'existait tout simplement pas : les dessins animés, c'était pour les enfants. (Et le préjugé a la vie dure! )

D'où évidemment, les erreurs de programmation que tu mentionnes, Marco.

Mais d'où aussi, je pense, les errements des premiers éditeurs de VHS tels que Manga Video. Ils devaient eux-mêmes se demander "Qu'est-ce qu'un dessin animé par ado? Que recherchent les ados?" Et la réponse : si ce n'est pas du dessin animé "gentil" (pour enfants), c'est forcément du trash, du gore et du sexe! C'est sûr qu'avec ce type de pub, il était difficile d'argumenter dans le sens du "Mais non, c'est une juste une autre forme d'expression, culturellement un peu différente..."

En plus, on ne peut pas dire qu'on n'aimait pas ça, dans une certaine mesure, puisque ça se vendait. J'ai adoré Akira au cinéma et quand il est sorti en VHS, j'ai voulu monter à mes parents à quel point ce film était génial. Ils ont tenu CINQ minutes devant la scène ultra-violente de la baston de motards du début.

Oui, Orange Mécanique était sorti depuis de nombreuses années, mais là, c'était du dessin animé : je pense que pour la génération de mes parents, ça n'était pas CENSE être aussi trash. (Je ne leur ai jamais montré Happy Tree Friends! Tout mignons, ces petits personnages en peluche...).

Mais bon, rien de nouveau sous le soleil non plus : toute génération a eu son fossé d'incompréhension avec la précédente et la suivante. Idriss Aberkane a dit un jour que toute révolution (technologique, artistique, culturelle, etc.) passe par trois étapes :

1. C'est ridicule ("Qu'est-ce c'est laid, ces japoniaiseries!")

2. C'est dangereux ("Ces saloperies ultra-violentes pervertissent notre belle jeunesse!")

3. C'est évident ("Ah bon, Papa, il a existé une époque où les mangas n'existaient pas?")

Les premières générations manga ont souffert seulement parce qu'elles ont eu raison trop tôt. Mais elles peuvent se consoler en constatant qu'il est aujourd'hui évident que leur combat a été remporté haut la main. Les détracteurs du passé sont...passés, et nous sommes les nouveaux leaders d'opinion.

Mais prenons garde à l'âge et restons jeunes dans nos têtes. Car facile et insidieux est le passage de "jeune révolutionnaire" à "vieux con"!